Chauveau-Lagarde

Quand on dit Chauveau-Lagarde, on pense immédiatement à l'avocat de Marie-Antoinette, en oubliant qu'il fût l'un des plus talentueux avocats français.

Sur cette défense de Marie-Antoinette, on lira avec intérêt l'article de M. Yves Ozanam : "Comment défendre Marie-Antoinette ?  La reine devant le tribunal révolutionnaire".

S'il semble que la Révolution française l'ait rempli d'espoir, il fut arrêté parce que considéré comme trop indulgent à l'égard des contre-révolutionnaires.  Déjà, après avoir fait acquitter le général Miranda, Marat le dénonça à la vengeance du peuple.  Il répondit par une audacieuse apostrophe qu'il osa faire afficher à la porte de Marat.

Dans ses Quelques esquisses de la vie judiciaire de M. Chauveau-Lagarde, Louis-Aimé Martin nous relate son emprisonnement : 

"Conduit à la conciergerie, il traversa la couloir humide et sombre sur lequel s'ouvrait la chambre de la Reine ; la même lampe brûlait à la même place ; son coeur se serra.  Dans cet enfer, il n'y avait plus qu'une espérance, la mort.  Ce qui lui arriva en ce moment, il n'a jamais pu se le rappeler : c'était comme les cauchemars d'un songe pénible.  Il était dans un cachot et avait deux compagnons ; puis on vint les prendre et ils ne revinrent plus.  D'autres furent mis à sa place, on les prit encore et ils ne revinrent plus.

"Pendant quarante jours, il vit ainsi passer 23 victimes : c'était l'antre de Polyphène, on n'en sortait que pour mourir.  Par une permission de la Providence, M. Chauveau-Lagarde fut oublié, et être oublié alors, c'est être sauvé."

Il fut encore l'avocat de Charlotte Corday.

Compromis par l'insurrection royaliste du 13 vendémiaire an IV (5 octobre 1795), il fut condamné à mort par contumace.  Il sa cacha, attendant que le calme fût revenu, si bien que, quand il reparut finalement, la sentence fut annulée.

Emprisonné, oublié en prison, libéré, condamné à mort, condamnation annulée, le 8 juillet 1806 il est nommé avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation.  Après la Restauration, il fut avocat au Conseil du Roi et président du Conseil de l'Ordre des avocats.

Louis-Aimé Martin dit encore de lui :

"Braver la mort dans un moment d'héroïsme ou de désespoir, ce n'est rien ; mais la braver toujours, se placer en face de ceux qui la donnent, les blesser dans leur férocité, dans leur système de dépopulation, leur arracher une victime sur cent ; être témoin de leur rage, voir leur vengeance s'apprêter et continuer son office vertueusement et simplement jusque sous le fer des bourreaux, voilà ce qui sera l'honneur éternel du barreau de Paris, voilà ce qui méritera à M. Chauveau le reconnaissance à la postérité. (...)

"Une belle figure, une belle taille, un bel organe, de la noblesse, de la sensibilité, une connaissance profonde des hommes, une âme sympathique à ses juges et à son auditoire, nous ne parlons ni du courage ni du sentiment du devoir, on les a vus à l'oeuvre, M. Chauveau-Lagarde possédait toutes ces qualités qui font les grands avocats."

Dans son Histoire des avocats en France, Bernard Sur le décrit comme suit : "Style et clarté.  Il s'est illustré comme l'un des premiers avocats pénalistes du Marais et surtout l'avocat courageux de Marie-Antoinette, de Madame Elisabeth et de Charlotte Corday".

Une exposition sur "Chaveau-Lagarde : un avocat au tribunal révolutionnaire" se tiendra du 5 septembre au 16 octobre 2018 dans la chapelle expiatoire, Paris (8e), 29 rue Pasquier.



Cet article a été écrit notamment à partir d'extraits de la page Wikipedia.


Henri Laquay

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Droit pénal : l’absorption en droit pénal

Maître Henri-René GARAUD : mon intime conviction

"Un avocat porté disparu : le mystère Jacques Vergès"