Droit pénal : la loi « Salduz » en vigueur depuis ce 1er janvier 2012
J’ai écrit plusieurs articles sur la jurisprudence européenne relative
à l’assistance et à la présence de l’avocat lors de l’interrogatoire d’un
suspect ou d’une personne privée de liberté (ici).
La loi belge du 13 août 2011 dite loi « Salduz » reprend
en partie les exigences de la Cour européenne des Droits de l’Homme. Cette loi est applicable depuis ce 1er
janvier 2012.
Il m’est impossible de détailler le contenu de cette loi qui a déjà
fait l’objet de nombreux commentaires.
En résumé, et concernant la présence de l’avocat (je n’aborde pas
les autres droits, notamment ceux qui existaient avant cette nouvelle loi), les
lignes directrices de cette loi sont les suivantes :
1/ La personne entendue quelque soit sa qualité.
Une personne qui n’est ni suspect, ni privée de liberté, n’a pas le
droit d’être assistée d’un avocat.
Elle a le droit de recevoir une information succincte des faits à propos
desquels elle est interrogée et elle a le droit de ne pas être contrainte de s’accuser
elle-même.
2/ La personne non privée de liberté entendue à propos d’infractions
qui peuvent lui être imputées.
Elle a les mêmes droits que ceux accordés à la personne entendue
quelque soit sa qualité.
Pour autant que l’infraction puisse entraîner la délivrance d’un
mandat d’arrêt, elle a en outre le droit, avant la première audition, de se
concerter confidentiellement avec un avocat de son choix ou un avocat désigné.
Soit la convocation de police reprend une information succincte des
faits à propos desquels la personne sera entendue et les droits dont elle
dispose. Dans ce cas, la personne est
présumée avoir consulté un avocat avant de se présenter à son audition.
Soit la convocation ne reprend pas l’information succincte des
faits à propos desquels la personne sera entendue et les droits dont elle
dispose. Dans ce cas, l’audition peut être
reportée une seule fois à la demande de
la personne à interroger, afin de lui donner la possibilité de consulter un
avocat. Il en va de même si l’audition
n’a pas lieu sur convocation.
3/ La personne privée de liberté.
Avant d’être interrogée par
les services de police ou, à défaut, par le procureur du Roi ou le juge
d'instruction, elle a le droit de se concerter préalablement avec un
avocat. Ce droit est organisé. A partir du contact pris avec l’avocat choisi
ou avec la permanence de l’Ordre des barreaux, la concertation confidentielle
doit avoir lieu dans les deux heures.
Cette concertation confidentielle aura une durée maximale de trente
minutes. Après cette concertation, l’audition
peut débuter.
L’avocat doit être présent pendant les auditions qui ont lieu dans
le délai de 24 heures qui est le délai de « garde à vue » ou lors de
la prolongation de ce délai. L’avocat a
notamment pour mission le contrôle du respect des droits accordés à la personne
auditionnée et les conditions dans lesquelles l’interrogatoire a lieu.
La personne privée de sa liberté a également
droit à ce qu'une personne de confiance soit informée de son arrestation, par
la personne qui interroge ou une personne désignée par elle, par le moyen de
communication le plus approprié. La loi
prévoit toutefois que s'il existe, en raison de la communication de cette
information, de sérieuses raisons de craindre que l'on tente de faire
disparaître des preuves, qu'il y ait une collusion entre l'intéressé et des
tiers ou que celui-ci se soustraie à l'action de la justice, le procureur du
Roi ou le juge d'instruction en charge du dossier peut, par décision motivée,
différer cette communication pour la durée nécessaire à la protection des
intérêts de l'enquête.
Dans son arrêt Sapan c. Turquie, la Cour européenne des Droits de l’Homme
a considéré qu’il y avait violation de l’article 6 de la Convention dès lors
que l’avocat n’avait pas eu accès au dossier répressif. Or, la loi belge n’autorise pas l’avocat à
avoir accès au dossier répressif. L’avocat
veillera donc à demander l’accès au dossier répressif. S’il lui est refusé l’accès à ce dossier, l’avocat
en demandera qu’il en soit fait mention au P.V.
Dans son arrêt Brusco c. France, la Cour européenne évoque non
seulement l’assistance de l’avocat lors des premières auditions mais également
lors de celles qui suivent. La loi belge
ne le prévoit pas. L’avocat demandera
donc à être averti et à pouvoir assister à chaque audition.
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Henri Laquay,
Avocat au barreau de Bruxelles.
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