Droit pénal et Facebook. Première condamnation pénale.

J’ai écrit plusieurs articles sur les conséquences juridiques d’une mauvaise utilisation de Facebook et ai donné plusieurs interviews à la presse écrite, audio et télé.  Pour lire tous mes articles sur Facebook, cliquez ici.

La presse relate deux nouveaux exemples de mauvaise utilisation de Facebook.  Cette fois, les fais sont plus graves puisqu’il s’agit d’infractions pénales commises sur Facebook.

Un juge d’instruction de Termonde vient d’inculper pour faux en informatique une femme de 40 ans qui avait créé un faux profil Facebook au nom d’un avocat dont elle avait été la cliente.  Elle usurpait donc le nom d’un avocat en se faisant passer pour lui.  Elle avait intégré sur ce profil des commentaires insultants, méprisants et blessants.  Des collègues et des clients de cet avocat étaient amis sur ce profil Facebook, « richement documenté », selon la presse.  Via ce profil Facebook, cette femme donnait des rendez-vous à des clients, lesquels n’étaient évidemment pas suivis.  Elle prodiguait même des conseils juridiques.

Cette personne a été appréhendée grâce à l’enquête menée par la Computer Crime Unit, unité spécialisée en délinquance informatique.  Il semble qu’elle ait été arrêtée à la sortie d’un cybercafé duquel elle se connectait sur ce faux profil.

Le faux en informatique, visé à l’article 210 bis du Code pénal, est puni d’un emprisonnement de 6 mois à 5 ans et d’une amende ou d’une de ces peines seulement.  Je ne suis pas certain qu’en l’espèce il s’agisse de faux en informatique.  Il s’agirait plutôt d’une usurpation de nom telle que visée à l’article 231 du Code pénal lequel est puni d’un emprisonnement de 8 jours à trois mois et d’une amende ou d’une de ces peines seulement et d’une atteinte à l’honneur et à la considération des personnes telle que visée aux articles 443 et suivants du Code pénal et puni d’un emprisonnement de 8 jours à un an et d’une amende.

L’utilisation d’un pseudonyme neutre (ne faisant référence à aucune personne identifiée) n’est en soi pas une infraction pénale.  Il n’y a infraction que si, en utilisant un pseudonyme, une personne commet des infractions pénales (menaces, atteinte à l’honneur, …).  Elle sera poursuivie du chef de ces infractions pénales.

En revanche, le fait de créer au nom d’une personne identifiée un profil Facebook peut être considéré comme une infraction pénale.

Le tribunal correctionnel de Gand vient d’ailleurs de prononcer la première condamnation dans le cadre d’une utilisation frauduleuse de Facebook.  Une personne avait créé un faux profil au nom de son ancien patron et l’avait accusé d’adultère.  Verdict : 7 mois de prison avec sursis et à une amende.

Facebook n’est pas une aire de jeux où tout est permis.  Il n’y a pas d’impunité sur Facebook.  Je rappelle encore les conseils à suivre pour éviter tout problème :

1. Ayez un profil totalement privé.  Seuls vos amis pourront avoir accès à vos données.

Je l’ai expliqué plusieurs fois lors de mes interviews.  Si quelqu’un se promenait en rue avec une pancarte attachée sur lui, mettait sur son dos toutes ses photos et sur son ventre toutes ses coordonnées, acceptait que chaque personne qu’il croise puisse examiner toutes ces informations, on le prendrait pour un fou et il serait probablement interné.  C’est pourtant ce que certains font en ayant un profil public et en mettant sur ce profil quantité d’informations les concernant.  Ce ne sont pas seulement les passants de la rue qui peuvent avoir accès à ces données mais le monde entier …

2. Limiter le nombre de vos amis.  N’acceptez comme amis que vos vrais amis et pas vos connaissances, vos collègues de bureau, vos voisins, …

3. Même en limitant vos amis, ne mettez pas sur Facebook des données à caractère privé.  Posez-vous la question : oserais-je dire à mes vrais amis ce que je mets en ligne sur Facebook, leur montrerais-je mes photos de vacances, leur dirais-je ce que j’aime, ce que je n’aime pas, leur ferais-je part constamment de mes états d’âme, prendrais-je position sans réfléchir sur des sujets politiques ou autres, …

4. Ne portez pas d’accusation dont vous devriez répondre.  Dans la plupart des cas, Facebook a un caractère public.  Porter une accusation sur Facebook, c’est souvent porter une accusation publique.  Une femme belge avait porté des accusations à l’égard d’un médecin français.  Plainte a été déposée et elle devra répondre de ces accusations.

5. Expliquez à vos enfants ces règles de base.

Henri Laquay,
Avocat au barreau de Bruxelles.

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