Livre : Procédure sauvage de Vincent Malacor



Les écrivains belges de qualité se font rares. Il est encore plus rare qu'un écrivain de talent soit également avocat. Vincent Malacor est le nom d'écrivain d'un avocat bruxellois qui a plaidé dans des affaires dites d'Etat. Il a mis son expérience d'avocat au service de sa plume. Et quelle plume ! Un style littéraire impeccable ce qui, de nos jours, est une injure aux médiocres.

Ce livre, qualifié par l'éditeur de polar, est un roman noir qui plonge le personnage principal, Me Thierry Pentièvre, dans une affaire politico-financière, une sordide affaire d'Etat. L'avocat veut justice et vérité. Des forces impalpables veulent qu'il se taise.

Mais, et c'est là l'originalité de ce livre, l'auteur ne se contente pas de raconter une histoire judiciaire terrifiante.

Son personnage principal, cet avocat sans peur, cet avocat solitaire comme le définit Jacques Isorni (voir ci-contre), nous balance des vérités sans euphémisme.

Sur les gouvernements démocratiques : "La peur impalpable, le malaise de celui qui n'est jamais "en ordre" sont devenus des moyens de gouvernement. Cette démocratie dispose maintenant de résidences secondaires, de souterrains, d'escaliers dérobés. Et qui sait où est le vrai pouvoir ?"

Sur la justice : "Le mot justice contient le mot juste. Or, les lois que le pouvoir judiciaire a pour mission de faire appliquer, n'ont pas la prétention d'être justes. Elles régissent des situations en vue d'un ordre. Lequel peut être injuste. Ce qui compte, c'est l'ordre."

Et sur les avocats, ce paragraphe que j'adore, criant de vérité : "Il se représentait l'entrée de la chambre du conseil, devant laquelle les avocats, par l'entrebâillement d'une porte capitonnée, vite refermée, guettent l'apparition de l'huissier chargé de crier l'ordre dans lequel allaient être appelés les affaires inscrites au rôle. Alors, les toges noires s'abattent sur lui, puis se dispersent avec des claquements de drapeaux, laissant sur place le petit fonctionnaire dont personne ne pourrait dire le nom. Ils l'abandonnent à sa solitude sacrée, curieusement intacte. Et, sans doute, rempli d'importance pour s'être livré à quelque confidence que sa position lui permettait de recueillir sur l'humeur d'un juge ou d'un substitut ou la bourde d'un plaideur. Regrettable familiarité que son père n'aurait pas même imaginée. Il y voyait un aspect de l'asservissement du Barreau dont le zèle domestiqué allait réduire un jour l'exercice des droits de la défense à une pantomime rituelle sans conséquence pour le justiciable."

J'ai été convié à la conférence de presse animée par le journaliste Luc Beyer qui s'est tenue au Cercle Gaulois le 1er octobre dernier. J'étais heureux de voir plus de cent personnes à cette conférence, tous ravis de retrouver un écrivain de talent, politiquement incorrect, nageant à contre-courant et un avocat courageux qui a rappelé toutes les affaires judiciaires belges non élucidées. A lire absolument.

Procédure sauvage de Vincent Malacor
Editions Thomas Mols.

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