Droit social / Droit du travail : Pourquoi les tribunaux du travail sont-ils surchargés ?

Les juridictions du travail, soit le Tribunal du travail et, en appel, la Cour du travail, tranchent, en résumé, les litiges entre les employeurs et les travailleurs, les litiges portant sur la sécurité sociale (pensions, allocations de chômage, …) et l'aide sociale. Pour connaître précisément la compétence du tribunal du travail, il faut se référer aux articles 578 à 583 du Code judiciaire. Vous le verrez, si vous avez le courage de lire ces articles, le nombre de conflits soumis aux juridictions du travail est considérable.

Malgré cela, les juridictions du travail étaient celles où l'arriéré judiciaire était le moins important. En matière de licenciement, devant le Tribunal du travail de Bruxelles, les parties en litige pouvaient espérer qu'un jugement soit rendu +/- un an après la citation en justice (pour autant que les parties respectent un calendrier de dépôt de conclusions raisonnable). Ce délai était beaucoup plus long devant les autres tribunaux. Les juridictions du travail, qui n'ont pas plus de moyens que les autres, étaient donc parfaitement organisées à la satisfaction des justiciables et de leurs avocats.

Un des objectifs du législateur est de diminuer l'arriéré judiciaire, soit de diminuer l'attente pour obtenir un jugement.

Tout en poursuivant cet objectif, le législateur a ajouté aux tribunaux du travail une compétence : le règlement collectif de dettes. Les personnes ne pouvant faire face à leurs créanciers peuvent obtenir un règlement collectif de dette. Pas la peine de préciser que, en cette période de crise, le nombre de ces demandes est considérable. Si le législateur ajoute une charge considérable de travail à une juridiction, il est logique que cette juridiction obtienne plus de moyens matériels (informatiques et autres pour l'encodage et le traitement de ces affaires) et humains (il faut des juges supplémentaires pour juger ces affaires supplémentaires et des greffiers supplémentaires pour assister les juges supplémentaires). N'est-ce pas là une question de simple bon sens ? Mais le législateur a-t-il encore du bon sens ? Ce ne fut évidemment pas le cas. Les tribunaux du travail croulent donc sous le nombre de dossiers, à tel point que, dans certains tribunaux, il n'y a pas assez d'armoires pour les classer. J'ai même vu, dans un journal télévisé, une technicienne de surface, entendez une femme de ménage, classer les plis judiciaires, ce qui n'est manifestement pas sa tâche (et qui pourrait poser quelques soucis juridiques à son employeur …).

Conséquence de cela : alors que, à Bruxelles, en matière de licenciement, un jugement pouvait être rendu +/- un an après la citation, il faut, pour l'instant, attendre deux ans. Et je sens que ce délai ne fera qu'augmenter. Le tribunal du travail, qui était celui où il y avait le moins d'arriérés, va probablement devenir celui où l'arriéré sera le plus important.

Mais rassurez-vous bonnes gens, le législateur avait trouvé LA solution. Une réforme du code judiciaire sur laquelle je fus le premier à en dire beaucoup de mal. Effectivement, cette réforme a l'effet exactement inverse : il accroît l'arriéré judiciaire. On voudrait dégoûter le citoyen de la justice qu'on ne s'y prendrait pas autrement.

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